/image%2F0983295%2F20140328%2Fob_6abeec_img-9047.JPG "Idylle urbaine & humaine")
D'une Coulée à l'autre en compagnie de Yohanna
Publié le 15 Mai 2014
Yohanna est une grande, une très grande amie. Elle m'a accompagnée dans mon expérience professionnelle précédente avec une fidélité et une énergie indéfectibles. Ensemble nous avons vécu une belle aventure humaine, ponctuée d'innombrables fous rires.
J'ai tenu à vous la présenter ici car Yohanna est très attachée à son quartier de résidence et m'en a souvent parlé avec passion. Ce sentiment, je ne le connais pas : j'ai résidé dans suffisamment de lieux et places pour ne pas me sentir affiliée à l'un d'entre eux en particulier ou lui vouer une telle fidélité.
Récemment, profitant de nos nouveaux temps libres respectifs, nous avons enfin fait une balade sur son territoire. Et j'ai alors compris ce qui plaisait tant à Yohanna : outre le fait que ce soit un bel endroit qui a su conserver une trace de son passé agricole et concilier nature et habitat grâce à des aménagements plutôt réussis, il est habité par un esprit collaboratif et d'entraide fort, aujourd'hui maintenu par ses très entreprenantes MJC Berlioz et du Laü. Ce quartier, c'est le quartier du Hameau.
Il m'est apparu indispensable d'évoquer ici ce lieu historiquement dynamique et un peu atypique de l'agglomération paloise.
Yohanna va donc avoir le plaisir de vous présenter "son" quartier à travers une petite promenade qui sent bon le bien-vivre ensemble.
Carole : Nous voici dans ton "domaine". Je te propose de déambuler d'un point à un autre pendant que nous parlons.
Yohanna : Avec plaisir ! Nous partirons de l'ancienne propriété de ma famille pour nous rendre à la Coulée Verte d'où nous rejoindrons la Coulée Douce.
C : D'une Coulée à l'autre, quel joli nom pour une balade ! Parle nous un peu de cette maison familiale.
Y : La maison située au 100 avenue de Buros était la maison familiale de ma grand-mère. J'y ai beaucoup de très bons souvenirs ; mes grands-parents étaient des personnes très ouvertes, très impliquées dans la vie sociale du Hameau et la politique. La maison est désormais la propriété de la commune de Pau et est occupée par les Restos du Coeur et des jardins familiaux. Il reste encore le nom de mes grands-parents sur la sonnette, cela m'émeut à chaque fois que je la regarde... Dans les années 50-60, il n'y avait que des champs et des fermes autour. On a du mal à se le représenter aujourd'hui ! Mais on peut encore voir quelques parcelles agricoles à deux pas d'ici. C'est là que nous nous rendons ensuite.
Départ de la balade avenue de Buros depuis l'ancienne maison familiale aujourd'hui base des Restos du Coeur, à quelques pas de la MJC Berlioz
Ancienne vue aérienne du quartier du Hameau (source inconnue) - au centre de la bordure gauche de la photo l'église du Hameau (pour agrandir la photo cliquez dessus)
Nous empruntons la rue qui fait face aux Restos du Coeur et arrivons devant un joli portail qui ouvre sur des jardins familiaux. Nous prenons quelques instants pour bavarder avec une "jardinière" et admirer les belles couleurs qui commencent à parer les potagers.
Face aux jardins et aux champs mitoyens, s'étend un espace en cours d'aménagement. Yohanna m'y conduit par un sentier piétonnier.
Carole : A quoi correspond cet endroit ?
Yohanna : C'est ce que l'on appelle la Friche Lauga. Ce sont 5 hectares d'une ancienne friche agricole sur lesquels s'articulent plusieurs projets artistiques alliant nature et créations éphémères et permanentes, mais aussi des espaces partagés à vocation agricole et des logements collectifs. C'est un lieu qui bouge, qui vit ; les habitants du quartier s'investissent dans chaque projet et s'approprient l'espace.
Un historique et une illustration des initiatives menées sur le lieu à feuilleter ici.
Entrée dans la friche Lauga et vue sur différents aménagements (cliquez sur une photo pour l'agrandir)
Nous atteignons ensuite la Coulée Verte, couloir végétal qui fait le lien entre la MJC du Laü à l'ouest et la MJC Berlioz à l'est. Cet espace de promenade, où l'on peut croiser des moutons parqués, a été conçu dans l'axe du lit du ruisseau du Laü aujourd'hui enterré mais qu'on peut toujours virtuellement enjamber via une jolie passerelle.
Nous quittons la Coulée verte et retraversons l'avenue de Buros en direction de la petite et jolie école Marancy. Nous en profitons pour embrasser la mère de Yo qui y travaille.
Nous contournons l'école par un chemin piétonnier qui longe les jardins de la MJC Berlioz. C'est l'endroit rêvé pour un pique-nique urbain !
Nous débouchons sur une large rue perpendiculaire à la rue Berlioz, jalonnée de pavillons.
L'histoire de ce quartier pavillonnaire mérite d'être racontée : retournons dans les années 50, en pleine période de reconstruction après guerre. L'Etat mène alors une politique de relogement dans l'urgence, basée sur le collectif et le bon marché (en témoignent les barres de la cité de l'Ousse des Bois). Mais ceux qu'on appelait les "mal-logés de la paix" ne sont pas tous d'accord avec cette politique ; ceux-là nourrissent le rêve de la maison individuelle en accession à la propriété. Ils décident alors de résoudre la crise du logement par leurs propres moyens en adoptant l'autoconstruction coopérative. Ainsi naît le mouvement bâtisseur des Castors : les Castors mutualisent leur argent et leur énergie pour construire leurs maisons et leur quartier. Une petite infographie explicative signée Arte à voir ici.
Voilà là un bel exemple de désobéissance et de réussite d'une utopie en temps de pénurie. Et porteur d'un beau message d’espoir, « pour dire à tous, et aux jeunes en particulier, qu'il y a toujours une aventure exaltante à vivre quelque part, celle d’hommes libres qui se groupent pour construire ensemble leur avenir » (BANCON Daniel et BLANC Roger. 40ème anniversaire des Castors de Pessac, 1948-1988).
Ce message, les MJC du quartier le transmettent dans chaque action qu'elles entreprennent en entretenant et faisant vivre ces lieux.
Nous arrivons au terme de notre promenade : la Coulée Douce. Et là, pas de chance : le café est fermé ! Comme tous les lundis matins apparemment...
Mais qu'à cela ne tienne, nous reviendrons un autre jour pour prendre le temps de co-bavarder avec Fred le gérant, au sujet de son café associatif et de la Cité des Pyrénées.
Cette balade avec Yohanna a été un moment délicieux de partage et de découverte d'un petit coin de ville.
La personnalité de Yohanna est sans conteste à l'image des valeurs de solidarité, de coopération et de résistance qui imprègnent chaque parcelle de son quartier.
D'où ils sont, tes grands-parents doivent être très fiers de toi Yohanna.
Quant à moi, je te remercie au nom de tous ceux qui liront et, je l'espère apprécieront, ce billet pour cette immersion dans ces lieux de faire et vivre ensemble.