Entre les mains de Laurence

Publié le 25 Août 2014

La porte s'ouvre et j'aperçois les yeux pétillants de malice de Laurence. Nous pouffons telles les deux adolescentes que nous avons été ensemble : elle de se retrouver à la place de la co-bavarde, moi d'endosser le rôle de l'"envoyée spéciale".

Oui, Laurence et moi sommes deux très vieilles copines. Liées par ce genre d'amitié avec laquelle on grandit et on meurt ; on se fréquente peu mais le plaisir de se retrouver est parfaitement intact à chaque rencontre et nos conversations interminables. Nous avons donc été parfaitement incapables de ne pas déborder du sujet qui nous intéresse aujourd'hui. Pas moins de trois rendez-vous ont donc été nécessaires pour mener à bien notre mission : celle de vous faire découvrir l'univers de Laurence et le promouvoir.

Laurence a ouvert son atelier il y a peu au quatrième étage d'un immeuble calme. J'y rentre pour la première fois en juin ; je découvre une grande pièce blanche à la lumière tamisée par des voilages rose pourpre.

Une immense table de massage trône au centre de la pièce. Une musique discrète, des bougies et des senteurs douces invitent immédiatement à la relaxation. Le tumulte de la vie et de la ville sont par magie restés sur le palier. Et le premier mot qui me vient à la bouche est bien-être. Je commence alors notre bavardage en questionnant Laurence sur sa conception du bien-être : elle me répond en m'offrant une délicieuse tisane.

Laurence : Je suis ce que l'on nomme désormais une spa praticienne : je pratique des massages "bien-être" qui se placent quelque part entre le massage sensu stricto kinésithérapeutique et le modelage des salons d'esthétique.

Le massage du kiné est pratiqué par le corps médical et reconnu par le système de protection sociale. L'apprentissage du modelage esthétique ne s'appuie par contre sur aucune base physiologique ni médicinale. Le massage bien-être quant à lui est un dérivé des médecines douces et traditionnelles indiennes dont l'"Ayurvéda", littéralement "science de la vie" centrée sur toutes les énergies et vieille de plus de 5000 ans ; je reproduis ici des gestes immémoriaux perpétués depuis des millénaires à travers tous les continents et dont l'efficacité n'est plus à démontrer grâce à leur approche globale. Mais seulement pour la plupart des gens ignorée...

Carole : Qu'est-ce qui t'a amenée à devenir spa praticienne ?

Laurence : J'ai tout au long de ma vie été attirée par la voie de la recherche spirituelle au travers notamment de la pratique du Tai Chi, du Reiki dont j'ai un brevet de maîtrise, mais aussi de domaines plus ésotériques. Les moyens d'atteindre l'équilibre énergétique entre le corps, l'esprit et le monde me passionnent. En parallèle et dans un tout autre registre, je travaillais dans le commerce car j'ai aussi le goût du contact avec la clientèle. J'ai longtemps été en quête d'une activité professionnelle qui me permettrait d'allier ces deux facettes de ma personnalité. Un jour, tout à fait par hasard, je suis tombée sur une publicité pour une formation de spa praticienne et ça a été le déclic : j'avais identifié le moyen de faire cette synthèse. C'était fin 2012.

C. : Comment s'est déroulée ta formation ?

L. : Elle a duré un an. Un an particulièrement difficile et éprouvant car j'étais la seule à croire dans mon projet et j'ai eu à me battre pour l'imposer et le faire accepter par mon entourage. De plus une année c'est bien peu comparé à la quantité phénoménale de techniques à acquérir et à maîtriser. J'ai souvent pleuré d'épuisement mais mon acharnement a payé ; j'ai obtenu ma certification et ce métier me plaît énormément.

C. : Avec ton expérience de spa praticienne, quel est ton constat sur le rapport au corps au 21e siècle ?

L. : Ce n'est un secret pour personne, le corps va mal. Ce corps en souffrance est la plupart du temps l'expression d'émotions et/ou d'ambitions refoulées ou mal dirigées. Nous évoluons dans un monde envahi par les technologies, hyperconnecté, hypercompétitif où la pénurie d'humanité est compensée par la surconsommation de drogues, d'antidépresseurs... et/ou de biens matériels. Le corps est complètement oublié, déconnecté voire maltraité. Il est en crise. Il a beau crier, on ne l'écoute plus. Je suis là pour aider à rétablir le "dialogue".

C. : Comment se déroule une séance dans ton atelier ?

L. : J'accompagne les personnes dès leur arrivée dans l'atelier ; avant de rentrer en contact épidermique avec elles, je prends le temps nécessaire au dialoque et à l'écoute. Je leur pose quelques questions mais répond aussi aux leurs. Ensemble nous définissons le type de massage approprié à leur état d'esprit du jour ou de la période, aux tensions physiques ou morales ressenties etc... J'en propose 7 au total. La durée d'un massage varie de 1 à 2 heures. Mais tu vas faire l'expérience du massage tout de suite ! Installe-toi sur la table.

Laurence quitte alors la pièce pour me laisser le temps de me dévêtir et de m'allonger sur la table de massage, le corps dissimulé sous une serviette.

Elle attend mon signal pour revenir auprès de moi et commence son massage en m'invitant au silence et à la relaxation (facile à dire, moins facile à exécuter...).

Débute alors un enchaînement de gestes et de déplacements qui me fait penser à une véritable chorégraphie autour de la table. Laurence évolue discrètement et avec fluidité autour de mon corps telle une danseuse.

L'heure passe. Ou plutôt le temps semble s'être contracté : quand Laurence me demande de rouvrir les yeux, je n'en reviens pas que la séance soit terminée.

Malgré la technique bien huilée de Laurence (le jeu de mots était trop tentant), le plus difficile pour moi a été de me taire et de lâcher mentalement prise. Il est aisé de se mettre à nu par la parole, beaucoup moins par le corps. Les tensions s'ancrent, la pudeur fait barrage. Lorsqu'on est blindé, difficile de (re)devenir malléable... Laurence n'a pas été dupe. Elle m'encourage à renouveler l'expérience et j'acquiesce volontiers : j'ai vraiment envie de retrouver une "souplesse existentielle" entre les mains de Laurence !

Ainsi et pour conclure, dans une société où la quête de sens, sens dans son travail, sens dans sa vie sociale... se fait de plus en plus ressentir, il m'apparaît désormais, grâce à cette discussion et à cette première expérience de massage bien-être avec Laurence, qu'avant toute démarche d'amélioration de son existence, il est nécessaire de recouvrer un corps !

Débarrassés de toute pression et enfin reconnectés à notre esprit et à l'espace, nos corps recommenceront ainsi naturellement à vibrer. Vibrer en temps réel dans le monde réel avec les autres corps environnants.

Une autre façon de réveiller notre danseur intérieur d'ailleurs, n'est-ce-pas Nellie ... ?

Laurence appartient à cette petite armée silencieuse, et pas assez (re)connue, donneuse de l'énergie qui nous rend capable de donner à notre tour mais aussi capable de recevoir...

Une façon simple et naturelle de (re)créer un cercle vertueux.